On aime parce que l’on donne ou l’on donne parce que l’on aime ?

Dans le Mikhtav meEliahou, rav Dessler se demande si l’être humain donne parce qu’il aime ou bien s’il aime parce qu’il donne. Contrairement à ce que le commun des mortels pense à ce sujet, rav Dessler démontre que c’est la dernière proposition qui est vraie : en effet, l’amour provient du don et non l’inverse. Et pour preuve, il rapporte un incident dont il fut lui-même témoin lors de la Première Guerre mondiale. Cette anecdote ressemble à s’y méprendre à ce qu’il vécut lui-même lors de ses premières années passées à Londres, tout comme ce qu’il éprouva pendant la Seconde Guerre mondiale, où il fut à nouveau séparé de sa femme et de ses enfants : 

« J’ai connu un jeune couple qui avait un fils. Le père comme la mère l’aimaient comme la prunelle de leurs yeux. Pendant la guerre, la ville qu’ils habitaient fut conquise et ils durent prendre la fuite. Ce jour-là, comme la jeune mère ne se trouvait pas chez elle, le père s’enfuit de son côté avec leur jeune enfant, alors que la mère partait dans la direction opposée, de sorte que la famille se retrouva séparée par les lignes de front. Ils vécurent ainsi toutes les années de guerre, séparés les uns des autres, se lamentant et pleurant amèrement. Finalement, le calme revint, la paix fut signée et la famille fut à nouveau réunie – et quelles retrouvailles !

Mais une chose incroyable se produisit : parce que le petit garçon que la mère retrouva avait grandi, il fut à ses yeux presque comme un étranger. Elle se languissait de l’enfant qu’elle avait laissé avant les hostilités. Mais il n’était plus : la guerre et la séparation le lui avaient ravi, et la relation qu’entretenait le père avec son fils était plus forte que celle de la mère avec l’enfant retrouvé… Comment expliquer un tel phénomène ? En vérité, c’est le père qui avait élevé, éduqué, choyé l’enfant à la place de sa mère. Elle ne pouvait plus rattraper ces années perdues, ni remplacer ce que son absence avait brisé. Durant toutes ces années, elle n’avait rien pu donner à son fils : l’amour qui naît du don appartenait à présent et intégralement au père. » 

 

Cet extrait est issu du livre « Rav Dessler : sa vie, son œuvre » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation.

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