Vayigach. Tout est décret divin

« L’Eternel m’a envoyé avant vous pour vous préparer une ressource (…) Non, ce n’est pas vous qui m’avez fait venir ici, c’est D.ieu » (Béréchit 45,5-8)

Longtemps avant que la servitude égyptienne ne commence, il avait déjà été annoncé à Avraham : « Ta postérité sera asservie et opprimée » (Béréchit 15,13). Par conséquent, il est difficile de comprendre pourquoi les Egyptiens furent sévèrement punis – des Dix plaies et de l’engloutissement dans la Mer rouge – pour l’esclavage infligé aux enfants d’Israël. Bien plus : dans la mesure où cette servitude était l’expression de la volonté divine, pourquoi punir ces hommes qui se conformèrent simplement à ce dessein ? La réponse, selon le Ramban, réside dans le fait que les Egyptiens « agirent tyranniquement à leur égard » (Chémot 18,11), c'est-à-dire qu’ils agirent bien au-delà du décret divin visant l’oppression des Hébreux : ils s’évertuèrent en effet à les exterminer (le Rambam répond également de manière identique).

Dans son Da’at Tora, rav Yérou’ham souligne combien ces explications s’adressent à chacun de nous, au quotidien. Nous devrions comprendre que nous n’avons aucune raison fondamentale d’en vouloir à une personne qui nous agresse, quelles que soient les circonstances dans lesquelles elle le fait : notre agresseur est en tout point semblable à un émissaire du Tribunal, qui accomplit la mission dont on l’a chargé. David exprima cette idée explicitement le jour où Chim’i ben Géra l’accabla de malédictions (Chmouel II 16,10) : « C’est D.ieu qui lui a inspiré de maudire David : qui peut lui demander compte de sa conduite ? » De ce fait, le roi ne laissa pas Avichaï ben Tsérouya attaquer Chim’i ben Guéra. C’est en ce sens que Yossef dit ici à ses frères : « Ne vous affligez pas, car c’est pour le salut que D.ieu m’a envoyé. » Contrairement à notre manière de concevoir ce verset, Yossef ne cherche pas à se présenter comme l’homme bon et clément, qui tenterait de rassurer ses frères par des paroles lénifiantes : « Ne vous accablez pas trop, votre acte a finalement abouti à une fin bienheureuse… » D’ailleurs, jamais la Tora ne cautionnerait de tels propos, et encore moins dans la bouche de Yossef !

Au contraire, ces paroles doivent être comprises dans leur sens littéral : cette aventure n’a été déclenchée que par décret divin – « D.ieu m’a envoyé devant vous » – et par conséquent, vous n’êtes aucunement responsables de ces faits. Aux yeux de la Tora, avant de rétorquer, une personne agressée doit chercher une autorisation légitimant sa réaction. Tout événement n’étant que l’expression de la Volonté divine, comment pourrions-nous répondre à l’intermédiaire qui l’a accomplie ? Voudrait-on aussi s’en prendre à la pierre qui nous à frappés ? Rav Yérou’ham conclut son propos par ces mots : « Telle est la doctrine de la Tora : à chacun de s’y attacher ! »

Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.

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