« Myriam leur répondit : “Chantez pour l’Eternel, car Il est souverainement grand ! Chevaux et cavaliers, Il les a jetés dans la mer“ » (Chémot 15,21)
Ce chant qu’entonnèrent les femmes à l’initiative de Myriam mérite quelques éclaircissements : 1. Quelle question les femmes d’Israël avaient-elles posée à Myriam, pour que celle-ci dût leur « répondre » ? 2. On remarque que le mot « leur » – « Myriam leur répondit » – est écrit au masculin dans le verset [lahem]. La réponse de la prophétesse ne s’adressait-elle pas aux femmes ? 3. Pour quelle raison, parmi les nombreux versets de la Chira, Myriam choisit-elle d’entonner précisément celui-ci : « Chantez pour l’Eternel (…) Il les a jetés dans la mer » ? Toutes ces interrogations, le rav Ich’aya ‘Heishin les résout dans son Yalqout Maamarim par une seule et unique réponse. D’après lui, une question pertinente avait effectivement précédé la réponse de Myriam, qui s’avéra non moins brillante. Les femmes avaient subi autant que les hommes les tourments de l’exil égyptien. Et comme leurs maris, elles vécurent la sortie d’Egypte comme une merveilleuse délivrance. Cependant, si l’on examine l’intention et les objectifs de cette délivrance, nous remarquerons qu’une différence essentielle distingue les femmes des hommes.
Comme nous le savons, la sortie d’Egypte n’était pas un but en soi pour le peuple juif : ce n’était qu’un préambule aux véritables objectifs de leur délivrance, à savoir la révélation du Sinaï et le Don de la Tora. La rédemption était semblable à un couloir conduisant le peuple juif à son ultime destinée : recevoir la Tora des mains de D.ieu et accepter le joug des six cent treize mitsvot.Lorsque Myriam proposa aux femmes d’Israël d’empoigner leurs tambours pour rendre grâce à D.ieu de les avoir délivrées, elle fut en butte à une certaine réticence de leur part. Bien conscientes de l’enjeu exact des événements, ces dernières lui rétorquèrent que, dans la mesure où elles étaient dispensées de l’étude de la Tora et où leur rôle se cantonnerait à l’entretien du foyer et à l’éducation des enfants, elles n’avaient guère de raison de se livrer comme leurs maris à de telles manifestations de joie…
Mais cette objection ne troubla pas Myriam. Dans sa grande sagesse, elle clama à l’adresse de ses sœurs : « Voyez ! Chevaux et cavaliers, Il les a jetés dans la mer ! » – D.ieu n’a pas précipité dans la mer seulement les cavaliers égyptiens, mais aussi leurs montures. Or qu’avaient fait ces dernières ? Elles avaient simplement aidé leur maître à poursuivre Israël. Et si pour punir, D.ieu Se montre aussi inflexible, combien la générosité divine – toujours supérieure à l’Attribut de rigueur – saura-t-elle récompenser ceux (ou celles) qui secondent les agents du bien !Voilà pourquoi Myriam, pour répondre aux femmes, insista sur l’aide qu’elles apporteraient à leurs époux dans leur étude. Le pronom masculin « eux » que contient la réponse de Myriam souligne donc qu’elle répondit en désignant leurs maris, signifiant par là aux épouses que leur récompense viendrait du soutien qu’elles leur fourniraient. Nos Sages enseignent en effet que le mérite des femmes réside dans l’aide qu’elles apportent à leurs maris dans l’étude de la Tora. Le rôle qu’elles doivent jouer justifie assurément que l’on sorte en son honneur avec des chants et des tambours, car le but de la sortie d’Egypte ne s’adressait pas moins aux femmes qu’aux hommes.
Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.