Bechala’h. Rendre grâce pour les tourments autant que pour la délivrance

« Alors Moché et les enfants d’Israël entonnèrent le chant… » (Chémot 15,1)

« Moché dit : Par le mot “az“ [alors] j’ai fauté, le jour où j’ai protesté par ces mots : “Depuis [mé-az] que je me suis présenté à Pharaon, le sort de ce peuple n’a fait qu’empirer.“ C’est donc avec “az“ que j’entonnerai un chant ! » (Midrach)

Il convient de comprendre pourquoi, en entamant un chant qui débutait par l’expression avec laquelle il avait fauté, Moché répara sa faute.L’auteur du Bet haLévi explique que lorsqu’un homme veut exprimer sa gratitude à D.ieu et Le louer pour Ses bienfaits, il peut le faire de deux manières différentes :1. Il peut exprimer sa reconnaissance pour le seul fait d’avoir été sauvé de ses tourments. Dans ce cas, l’homme n’éprouve pas davantage de bonheur que s’il n’avait eu aucun problème. Pour lui, la seule joie éprouvée est celle d’être sorti indemne d’une situation fâcheuse, et il ne garde aucune émotion positive des épreuves auxquelles il a réchappé.

2. Par ailleurs, l’homme peut exprimer sa reconnaissance également pour les difficultés qu’il a traversées. Tel était le sentiment de Moché et des enfants d’Israël au moment où ils franchirent la mer Rouge, sentiment qui les incita à entonner un chant de grâce. Car leur bonheur n’était pas seulement celui d’avoir été sauvés du joug égyptien, mais aussi d’être devenus l’intermédiaire – l’instrument – par lequel le Créateur manifesta Sa gloire dans le monde. C’est pour cette raison que ce chant débute par ces mots : « Chantons à l’Eternel car Il est souverainement puissant ! » Leur hymne de grâce ne rendit pas moins hommage à la servitude qu’à la délivrance, car sans la première, jamais les prodiges d’Egypte n’auraient pu avoir lieu. En rappelant le mot par lequel il s’était plaint – « az » –, Moché sous-entendait l’idée suivante : bien que j’aie pu jadis m’insurger contre les rigueurs de l’oppression égyptienne, je viens aujourd’hui louer D.ieu précisément sur ce « az », c'est-à-dire sur ce motif précis qui m’avait jadis incité à me lamenter. Car une fois la délivrance arrivée, notre reconnaissance doit également prendre en compte les tourments qui l’ont précédée.C’est en ce sens que le roi David s’exclama (Téhilim 118,21) : « Je Te rends grâce de m’avoir accablé, j’ai bénéficié d’une délivrance » – je rends grâce à D.ieu de m’avoir confronté à l’adversité, car c’est par ce moyen que j’ai connu la délivrance et vu le Nom divin glorifié par mon entremise. Et pour ces deux dimensions, « Je rends grâce à D.ieu ! »

Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.

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