« Va rassembler les Anciens d’Israël » (Chémot 3,16)
Parmi les nombreuses leçons que nous délivre cette paracha, note rav Yé’hezqel Lewinstein (Or Yé’hezqel p.214), l’une des plus magistrales est relevée par le Saba de Kelm.
La chronologie des événements évoqués est la suivante : Moché rassemble d’abord les Anciens du peuple, et leur annonce l’approche de la rédemption. Alors, « le peuple y eut foi ». Ensuite, Moché et Aharon se présentent à Pharaon pour réclamer la libération du peuple hébreu.De prime abord, remarque le Saba de Kelm, l’ordre inverse eut été plus logique : nous savons en effet que l’entrée de Moché au palais de Pharaon fut accompagnée de nombreux miracles, notamment du fait que des lions en empêchaient l’accès (Yalqout Chim’oni Chémot 176). En outre, pénétrer dans le palais sans autorisation – véritable outrage de lèse-majesté – était passible de mort. Ceci étant, il aurait été certainement plus approprié d’envoyer d’abord Moché dans le palais du monarque, où s’y seraient produits ces différents miracles. Précédée de ces premiers signes de délivrance, l’annonce de la rédemption aurait été alors perçue tout naturellement par les enfants d’Israël !
Cette remarque souligne un point fondamental en matière d’élévation morale : tout engagement dans le domaine du spirituel ne peut être amorcé que par une initiative humaine. A cet égard, tant que le peuple juif n’avait pas répondu positivement à la promesse divine, la démarche auprès de Pharaon n’aurait pas pu être accompagnée de tant de miracles. Le fait que « le peuple eut foi » – c'est-à-dire qu’il crut en l’annonce de Moché – fut le détonateur du processus de rédemption, et suscita l’Assistance divine survenue dans le palais royal.Cette réalité se retrouve à tous les niveaux de la vie, même pour les choses de prime abord évidentes : nul épanouissement spirituel n’est envisageable tant que l’homme n’a pas manifesté une volonté déterminée d’y accéder. Et pour preuve, bien que D.ieu ait fait le serment de délivrer Israël de l’Egypte, rien n’aurait été possible si le peuple hébreu n’avait pas déclenché ce processus par l’impulsion de sa émouna.
Ces considérations renvoient à l’adage bien connu : « Tout commencement est difficile. » Comme nous l’avons vu, le premier pas doit, par définition, être celui de l’homme seul, avant même que l’Assistance divine ne commence à se manifester. C’est donc livré à lui-même qu’il devra effectuer cette première ouverture – serait-elle seulement de « la taille du chas d’une aiguille » – pour que d’immenses portails puissent ensuite lui être ouverts par le Créateur du monde.
Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.