Cours Hebdomadaire du Grand Rabbin d'Israël Rav Its'hak Yossef chlita
Le 1er Chvat selon Beth Chamay, correspond au nouvel an des Arbres, alors que selon Beth Hillel, cela est fixé au 15 Chvat. Comme nous le savons, lorsqu'il y a une discussion entre Beth Chamay et Beth Hillel, la Halakha est tranchée comme Beth Hillel.
Tou BiChvat
Tou BiChvat a un lien étroit avec le Maasser et la Orla. Il est rapporté dans le Adnei Paz, il y a de cela 300 ans, que le jour de Tou BiChvat, c'est le jour du jugement des arbres, et il faut prier afin de récolter de bons fruits dans l'année. De nombreux Rabbanim ont été interpellés par cela, comme le rapporte Rabbi ‘Haim Naé dans son livre Chnot Haim. Expliquons-nous : il est rapporté dans la Mishna (16a): le monde est jugé à quatre dates différentes. A Pessah, le monde est jugé sur la récolte ; à Chavouot sur les fruits de l'arbre, à Rosh Hashana les êtres humains son jugés et l’eau, à Souccot. Ainsi, comment se fait-il que Tou biChvat soit un jour de jugement sur les arbres alors que selon la Mishna c'est à Chavouot !
Rapporter des Fruits
Le livre Tikoune Issakhar a été le premier à rapporter la coutume de poser des fruits sur table le jour de Tou biChvat, notamment les sept fruits d’Israël :
Certains ont l'habitude de réciter une prière spéciale. Maran Harav n'avait pas l'habitude de lire cette prière. Mais il n’est pas du tout interdit de la dire. Maran Harav ne la lisait pas, car il ne souhaitait rater aucun moment précieux d'étude. Le plus important, est que le chef de maison relate et discute des lois de Brakhot avec les convives. Et c’est ainsi que Maran HaRav agissait : il conversait sur les multitudes facettes des lois de Brakhot.
L'avis du Choulhan Aroukh
Dans le Choulhan Aroukh (Yoré dé'a Siman 294), il est rapporté que la Orla est calculée jusqu'à Tou biChvat (durant les trois premières années, les fruits poussant sur un nouvel arbre sont interdits. A partir de la quatrième année, les fruits qui poussent sur cet arbre sont permis). Le compte des Troumot et Maassrot se fait également à partir de Tou biChvat (Choulhan Aroukh, siman 331).
La Orla – le compte
La plupart du temps, les semailles se font en hiver. De plus, la Halakha nous dit que si une personne a été indulgente au début de la pousse, elle sera stricte à la fin (des années d'Orla). Si au contraire, la personne a été stricte au début, elle sera plus indulgente à la fin. Expliquons-nous : Dans le cas où une personne a planté entre le 1er et 15 Av, il existe une loi différente à ce propos. En effet, trente jours dans l'année peuvent être considérés comme une année. De plus, le Rachach (traité Chabbat 73a) nous enseigne que le plant d'un arbre prend racine en quatorze jours. Notre exemple est type. Etant donné que le plant a été mis en terre entre le 1er et le 15 Av, après quatorze jours, nous arrivons à Rosh Hodesh Elloul (dans le cas où les semences ont été faites le 15 Av). Sachant que l'année commence le 1er Tishri (Rosh Hashana), trente jours séparent Rosh Hodesh Elloul à ce jour. Ainsi, ces trente jours seront considérés comme étant la première année de Orla ! Cependant, à la fin, quand arrive la quatrième année, nous ne nous baserons pas sur Rosh Hashana (1er Tishri) mais sur Tou biChvat, car nous avons été indulgents au début (comptant un an et trente jours). Exemple : une personne ayant planté un arbre entre le 14 et 15 Av 5776, trente jours après, arrive Rosh Hashana (début de l'année 5777). Le Rosh Hashana suivant, débute l'année 5778 c'est la seconde année, Rosh Hashana suivant (5779) c'est la troisième année. A la fin de ces trois années, lorsqu'arrive Rosh Hashana (5780), même si, normalement, les fruits poussant à partir de cette date ne sont plus Orla, mais considérés comme Nété Révay (fruits autorisé à la consommation), on se montrera néanmoins stricts, et nous attendrons les fruits poussant après le 15 Chvat 5780.
L'avis du Choulhan Aroukh – autres sources
Maran Hachoulhan Aroukh mentionne ce Rosh Hashana à quatre endroits différents : dans le Siman 131 (Halakha 6), il écrit explicitement qu'à Tou biChvat on ne dira pas de supplications. Dans le Siman 572 (Halakha 3), il enseigne qu'on n'institue pas de jeûne le jour de Tou biChvat. C’est pour cette même raison, qu’il est interdit à une personne de prendre sur soi un jeûne, le jour du décès de l'un de ses parents.
Jeûner le jour du décès d'un des parents
Nous pouvons retrouver cette coutume dans le traité Chvouot (20a). En effet, comme nous le savons, il sera défendu de faire un serment. La Guemara nous enseigne qu'il est interdit de jurer “de ne pas manger de viande ni de boire du vin de la même façon que l’on agirait lors du décès de son père”. C’est de cette Guemara que nous tirons cette coutume, celle de ne pas manger le jour du décès de l'un des parents. Ce jeûne est très important pour l'élévation de l'âme mais il ne doit pas empiéter sur l'étude de Torah. C'est pour cela, qu'un Kollelman, étant donné que cela peut l’empêcher de bien étudier, peut ne pas respecter un tel jeûne. Il en est de même pour un jeune homme étudiant à la Yéshiva. ‘’Kol Hamarbé Haré zé Lo méchoubah’’. Une personne qui n'étudiant pas toute la journée, devra jeûner.
Jeûner le jour du mariage
Certains ‘Hatanim ont pour habitude de jeûner le jour du mariage. Cette coutume est présente dans plusieurs communautés. Cependant, le Knésset Hagdola pense que les Sefaradim ne jeûnent pas. Tel est l'avis du Pri Hadama, il y a de cela 300 ans, ainsi que du ‘Hida. Rabbi Yéhouda Ayash se montre encore plus strict à ce propos : selon lui, il faut annuler cette habitude ! Le Conseil religieux de Jérusalem a écrit en ce qui concerne les institutions et coutumes, que même les Sefaradim doivent jeûner le jour de leur mariage. Pourquoi mettre de côté tous les Poskim rapportés plus haut ?! A plus forte raison si le jour du mariage tombe le jour de Tou biChvat.
La source
Il n'est, dans aucun endroit dans la Guemara, rapporté un quelconque point sur Tou biChvat. C'est le Mordekhi[1] (il y a près de 770 ans), qui souligne l'interdit de réciter des supplications à Tou biChvat. Etant donné que les trois autres Rosh Hashana dont nous avons parlé plus sont tous également un jour de Rosh Hodesh (jour durant lequel on ne fait pas de supplications), il en sera donc de même lors du nouvel an des arbres. Par la suite, tous les Rishonim et les Aharonim suivirent cette Halakha.
Les fruits glorifiés par la terre d'Israël – quelques exemples de la Guemara
On pourrait penser que le titre de “fruits d'Israël” concerne uniquement une époque antérieure à la nôtre. Mais la Halakha reste la même aujourd'hui en ce qui concerne les lois de Berakhot. Mais à quoi ressemblaient les fruits d'Israël avant ? Il est rapporté dans le traité Ketoubot (111b) : ‘’Rabba bar bar Hanna dit qu'il vit la terre ou coule le lait et le miel Eretz zavat halav oudvash : il vit des chèvres broutant sous des arbres, où les feuilles étaient très épaisses. Le lait des chèvres était si abondant qu’il coulait dans l'herbe. Au-dessus de ces chèvres on pouvait voir que les dattes étaient tellement épaisses, que du miel s’écoulait tout seul d’elles. Il se rendit compte que le lait et le miel formaient un fleuve d’une distance de 85km (22 Parssa). La Guemara continue : Rabbi Meir, Rabbi Chimon et leurs amis épluchèrent une pêche. Ils la dégustèrent, en furent rassasiés et il en restait même encore. On peut ainsi constater, ô combien les fruits étaient prodigieux ! Une fois Rabbénou Hakadosh rencontra Rabbi Hiya et lui dit qu'il avait entendu parler de son verger. Il lui demanda s'il pouvait le lui montrer. Il accepta, et s’y promenèrent (bien entendu, toujours en parlant de Divré Torah). De loin, Rabbi Hiya aperçut comme un troupeau de taureau, et dit à Rabbénou Hakadosh de faire attention qu'ils ne ravagent pas son verger. Rabbénou Hakadosch lui demanda de patienter et de continuer à marcher. En arrivant, Rabbi Hiya remarqua qu'en réalité, il ne s'agissait pas de têtes de taureaux, mais d'un vignoble ! Chaque raisin avait la taille d'une tête de taureau ! On pouvait percer un raisin avec une épingle, et boire ainsi le jus qui en sortait ! A cette époque, ils nettoyaient même leurs vêtements avec le vin ! Aujourd'hui nous sommes très loin de cela, mais petit à petit les choses s’arrangent et lorsque le Machia’h viendra, tout reviendra comme à cette époque.
Par quoi commencer ?
Dans le cas où toutes les bénédictions sont Ha'étz, alors on commencera tout d'abord par les fruits d'Israël. Lorsqu’il y a des fruits Ha'étz et Adama (ou bien même des légumes Adama) selon le Choulhan Aroukh[2], on commencera par celui que l'on a le plus envie de consommer. Tel est l’avis de Rabbénou Aye Gaon[3], Rabbénou Hannanel[4], le Rif[5], le Rosh[6], le Rashba[7], le Chiboulei Halékéth[8], et l’Eshkol[9], à l’inverse de ceux qui pensent qu’il faut commencer par la bénédiction d’Aetz.
Vin ou Datte ?
Lorsque nous avons du vin et un des fruits d'Israël, le Tour[10] rapporte au nom de Rabbénou Peretz, qu'étant donné que le vin a une importance particulière de par sa bénédiction, si l’on a une datte et du vin, on dira tout d’abord la bénédiction sur le vin[11]. Le Beth Yossef rapporte que la plupart des Méfarshim sont d’avis contraire. De plus, il ne mentionna pas l’avis de Rabbénou Peretz dans le Choulhan Aroukh. Ainsi, la Halakha sera différente de l’avis de Rabbénou Peretz. On devra dire tout d’abord la bénédiction sur le fruit d’Israël.
Un Hakham compris que le Beth Yossef trancha en fin de compte, comme Rabbenou Peretz. Au point où il contredit l’avis de Maran Harav Zatsal, lequel trancha dans la brochure « Kol Sinaï »[12], que l’on peut dire la bénédiction sur le fruit avant de faire la bénédiction sur le vin (c’est ainsi que nous l’avons rapporté dans le Yalkout Yossef[13]). Ce même Hakham écrit dans son livre que le vin doit devancer la datte. Mais la Halakha est tranchée comme nous l’avons dit plus haut : on récite la bénédiction sur le vin avant de la réciter sur la datte.
Fruit d’Israël ou Chéhéhiyanou
Si nous avons deux fruits de la même Berakha (Ha'étz), nous avons dit plus haut qu'on commencera d'abord par l'un des sept fruits d'Israël. Dans le cas où l’un des fruits, n’étant pas un fruit d’Israël, mais étant un fruit nouveau[14], on devra alors réciter dessus la bénédiction de Chéhéhiyanou. Comme il est rapporté dans Le Chou't Lev Avraham (un grand décisionnaire d'Amérique). Les Guemarot Yoma (33a) et Zéva'him (89a) prouvent cet avis. Le responsa Chraga Meir[15] tranche autrement et pense que l’on commence par le fruit d'Israël. La Halakha est tranchée comme le Chou't Lév Avraham, comme nous l’enseigne Maran Harav Zatsal, dans son livre Hazon Ovadia[16]. Tel est l’avis du livre Over Oréa’h[17].
Quelqu’un a un jour écrit, à l’encontre de l’avis de Maran Harav Zatsal[18]. Il s’étonne sur le fait que Maran Harav n’ait pas tenu compte du Responsa Chraga Meir. Il écrit, que si Maran Harav Zatsal avait vu cet avis, il s’y serait conforté. Mais pour quelle raison serait-il revenu sur sa décision ? Le responsa Chraga Méir était-il un Rishone ?!
Safék Berakhot Léakél
La Halakha nous dit qu’en cas de doute sur une bénédiction, on se montre plus souple. Ce principe est nommé Safék Berakhot Léakél. Cette loi existe pour la bénédiction de la Torah et également pour la bénédiction Mé’in Chéva. Concrètement, si l’on doute d’avoir récité la bénédiction, on ne la refait pas. En revanche, pour le Birkat Hamazon, étant donné qu’il s’agit d’une bénédiction de la Torah, même si l’on a un doute, on doit recommencer selon le principe : Safék déOraïta la’Houmra, en cas de doute sur une ordonnace Toraïque, on se montre plus strict, comme cela est rapporté dans le Yerouchalmi[19].
La bénédiction la plus précise
Lorsque la loi est tranchée de manière évidente en ce qui concerne la bénédiction adéquat d’un aliment, ou bien dans le cas où le fait de dire cette bénédiction n’engage pas un mensonge par cette Berakha prononcé, on ne craindra pas la règle rapportée plus haut deSafék Berakhot Léakél, car en fin de compte, selon tous les avis, la personne sera quitte à postériori.
D’ailleurs, le Magen Avraham[20] enseigne que même si la Halakha ne concerne qu’un fruit de l’arbre qui n’est pas encore mûr on ne dit pas la Berakha de « Aetz » dessus. Si la personne a tout de même dit cette Berakha, elle sera quitte.
Ainsi, si l’on a un doute sur la bénédiction à réciter pour le fruit d’un arbre, à savoir Adama ou Aetz, il est préférable de dire la bénédiction d’Aetz, car c’est celle qui est la plus précise[21]. Cependant, il faudra de prime à bord que la bénédiction dite soit celle qui est adéquat à l’aliment. Comme le verset nous dit[22]« Loué soit le Seigneur ! Jour après jour Il nous comble [de Ses bienfaits] », chaque jour selon sa bénédiction, chaque fruit avec sa bénédiction.
La Guemara dans le traité Berakhot[23] nous enseigne que toute personne qui profite de ce monde-ci sans réciter de bénédiction, est considéré comme un escroc[24] (Ma’al). Sur ce, le Talmud s’interroge, car d’un côté le verset[25] nous dit « A l'Eternel appartient la terre» et d’un autre côté, un second verset[26] dit « et la terre, Il l’a octroyée à l’homme». Le Talmud de répondre, qu’avant de dire la bénédiction, la terre appartient à Hachem. Mais après avoir dit la bénédiction, elle appartient à l’homme.
L’Avoudrahem[27] explique la Guemara ci-dessus, disant que lorsque le Talmud nous dit « toute personne qui profite de ce monde ci sans dire de bénédiction », elle parle de la bénédiction adéquate à l’aliment en question. De ce fait, celui qui ne dit pas la bonne Berakha, comme par exemple réciter la Bénédiction de Cheakol sur un aliment sur lequel il fallait prononcer Adama, c’est déjà considéré comme une sorte de ‘’tromperie’’. Il est intéressant de remarquer que Maran Harav Zatsal ne rapporte pas cet enseignement dans ses livres.
Ce qu’il faut retenir c’est l’importance de faire attention à chaque Berakha. On doit s’efforcer de réciter la bénédiction correspondant à l’aliment. On ne va pas chercher la facilité en se rendant quitte par une bénédiction plus globale, étant donné qu’il y a une discussion sur tel ou tel aliment. Il faut vérifier la Halakha !
Connaissance des lois de Berakhot
Il est donc indispensable de bien connaitre les lois de Berakhot qui ne sont pas aussi complexes que les lois de Chabbat ou de pudeur. A chaque fois qu’un nouveau volume de Yalkout Yossef sortait je faisais en sorte d’en remettre un exemplaire au Gaon Harav Ben Tsion Aba Chaoul. Lorsque je lui remis le volume sur les lois de Berakhot, assez épais, il me dit que les lois de Berakhot sont assez épineuses. Il me posa certaines questions et sur la façon dont j’avais tranché la Halakha dans certains sujets. Et je lui expliquais.
De même à Tou biChvat, chacun se doit de profiter de l’occasion pour enseigner les lois de Berakhot à sa famille.
Safék Berakhot ou bien Safék DéRabbanane
Le livre Zera Yaakov[28] questionne : pour quelle raison utiliser la règle de Safék Berakhot alors que nous pouvons utiliser la règle de Safék Dérabanane (en cas de doute sur une loi Rabbinique on sera plus souple[29]). Il répond en disant, que la règle de Safék Dérabanane, n’annule en rien le fait que la personne peut, si elle le souhaite, être plus rigoureuse. Ce qui n’est pas le cas en ce qui concerne Safék Berakhot, la personne est obligée d’être plus souple, car sans cela, c’est considéré comme une bénédiction en vain.
Alors, manger ou pas ?
Il existe une discussion en ce qui concerne cette règle : si nos sages nous enseignent qu’en cas de doute sur une bénédiction on devra être plus souple et ne pas dire à nouveau la Berakha, cela consiste t-il à ne plus manger l’aliment (Chév Véal taassé) ou bien on a le droit de continuer à le consommer (Koum vé’assé) ? Selon le Maharsha[30], cette règle concerne uniquement le principe de Chév vé’al Tassé. Ainsi, dans le cas où la personne ne se souvient pas si elle a dit la Berakha sur son thé, elle ne le boira plus. Tel est l’avis du Gaon Rabbi Akiva Iguère[31]. Maran Harav zatsal, rapporte dans son responsa Yehavei Daat[32] l’avis du Ritva, prouvant l’avis du Maharsha et de rabbi Akiva Iguére, ajoutant, que dans une situation où la personne ne peut plus boire car il doute sur la bénédiction, la personne pourra sortir de chez elle quelques minutes et y entrer à nouveau, le temps d’avoir fait Eisekh Hada’at (sorte d’interruption permettant l’oubli de sa consommation précédente). Ainsi, lorsqu’il rentrera, il aura la possibilité de faire à nouveau la Berakha. On agit ainsi afin d’éviter d’enfreindre l’enseignement du Talmud « toute personne qui profite de ce monde-ci sans dire de bénédiction, ressemble à un escroc ».
Selon la loi strcite, on a le droit de poursuivre la consommation de l’aliment, car la règle de Safék Berakhot s’applique même dans un cas de Koum vé’assé. Nous retrouvons cela dans plusieurs endroits du Choul’han Aroukh.
Une escroquerie ? Un sacrifice !
Pour comprendre cette Halakha, le Rivach[33] nous apprend qu’il faut tout d’abord savoir que nos Sages ont l’habitude d’élever le niveau de l’interdit dans leurs propos[34], afin d’enseigner la gravité de la chose. Notre cas est un exemple à cet enseignement : va-t-on dire qu’une personne ayant profité de ce monde sans dire de bénédiction, devra rapporter un sacrifice Mé’ila[35] ?! On me montra un jour l’avis du Méiri qui pourrait laisser croire que oui, mais celui qui approfondit bien les propos du Méiri, comprendra qu’il ne ramène pas réellement un sacrifice.
Onéne (statut d’un parent du défunt avant l’enterrement)
Il est possible de prouver l’avis que nous avons rapporté plus haut. En guise de rappel, lorsque nos Sages enseignent le principe de Safék Berakhot Léakél, ils autorisent cette personne à consommer l’aliment en question.
Lorsqu’une personne est Onéne, elle est exemptée de toutes les Mitsvot. En effet, ce statut lui permettra de s’occuper du défunt comme il se doit. Il lui est aussi interdit de faire ses prières et ses Berakhot. Mais même sous ce statut, nous n’avons jamais vu qu’une telle personne doit jeûner. Il lui est donc permis de manger, mais sans Berakha.
Ainsi, lorsque nos Sages disent que toutes personne qui profite de ce monde sans faire de Berakha, est considérée comme un escroc (Ma’al), cela ne concerne pas ceux qui ne doivent pas dire de Berakha. Même dans le cas où la personne se retrouve dans une situation de Safék Berakhot Léakél, elle mangera. Cette personne n’aura donc pas besoin de sortir de chez elle[36] et revenir, afin de pouvoir dire la Berakha.
Changement d’endroit
Il est rapporté dans le traité Pessahim[37] une discussion concernant une personne qui change de pièce durant le repas, est-ce considéré comme une interruption et donc reprendre la bénédiction à son retour ou pas ? Selon Rav Hisda, si l’aliment en question permet de fixer un repas, en l’occurrence du pain, le fait d’avoir changé de pièce durant le repas n’est pas une interruption. A son retour, la personne pourra continuer son repas sans dire à nouveau la Berakha. En outre, selon Rav Chéchét, il s’agit d’une interruption. A son retour, la personne devra alors faire Birkat Hamazon et ensuite refaire la Berakha de Motsi sur le pain[38].
Le Rif, le Rambam[39], le Rambane et le Rashba tranchent la Halakha comme Rav Chéchét. Alors que le Rosh[40] tranche la Halakha comme le Rav Hisda, selon lequel, le changement d’endroit demande une nouvelle fois la bénédiction uniquement sur des aliments sur lesquels la bénédiction finale est Boré Néfachot et non lorsqu’il s’agit de pain.
Le Choulhan Aroukh[41] tranche la Halakha comme, le Rif et le Rambam. Ainsi, si la personne est sortie au milieu du repas, même à base de pain, elle devra faire à nouveau la Berakha à son retour. Le Rama, quant à lui, suit l’avis du Rosh.
Selon la logique, en tant que Séfarade, nous suivons l’avis du Choul’han ‘Aroukh. Mais sur ce point précis, la coutume est différente. C’est pour cela, que dans le cas où la personne est sortie durant son repas, elle ne refera pas la Berakha. Tel est l’avis de plusieurs A’haronim, tel que le Yafé Lélév[42], le Zakhor léAvraham Elkalay[43], le Ben Ish Haï[44], et le Kaf Hahaïm. De cette manière nous avons tranché dans le Yalkout Yossef[45].
Voilà donc encore une preuve que dans un cas de Safek Berakhot, la personne peut continuer à manger. Dans le cas que nous venons de citer, la personne peut manger sans dire à nouveau Motsi, à l’encontre du Choulhan Aroukh.
Deux fois la Berakha
Une personne qui se rend aux toilettes et après 5 minutes souhaite encore s’y rendre, dans le cas où la personne n’a pas encore récité la Berakha de Asher Yatsar, elle devra la dire deux fois. Si elle s’est rendue aux toilettes à 10 reprises, mais qu’entre temps elle a oublié (Eisekh Hada’at), elle dira dix fois cette Berakha, l’une après l’autre. L’Orkhot Haïm rapporte cet avis, lequel est rapporté par le Beth Yossef[46].
Le Choulhan Aroukh[47] tranche également de cette façon. Mais la plupart des A’haronim tranchent autrement la Halakha. Comme le Ba’h, le Magen Avraham[48], le Hida dans son livre Birkei Yossef[49], le Kaf HaHaïm[50], le Yalkout Yossef et d’autres encore. Ainsi, même si la personne s’est rendue plusieurs fois aux toilette et a omis de dire Asher Yatsar, elle ne dira cette Berakha qu’une seule fois, à cause de la gravité de prononcé une Berakha en vain, et ce, même à l’encontre de Maran Hachoulhan Aroukh. J’ai pu compter une fois, plus d’une quarantaine d’A’haronim n’étant pas du même avis que le Choulhan Aroukh à ce niveau-là.
Même si, comme nous le savons, le Rav Pé’alim[51], écrit que même s’il y a 100 A’haronim qui contredisent Maran, nous suivrons quand bien même son avis. Mais lorsqu’il s’agit des Berakhot, on dira Safék Berakhot Léakél.
Jusqu’à quand peut-on réciter la bénédiction d’Asher Yatsar ?
Le livre Kissé Eliahou, du Gaon Rabbi Eliahou Israël, écrit que l’on peut réciter cette bénédiction durant une durée indéterminée, et peut être récitée même après plusieurs heures voire même plusieurs jours ! Tel est l’avis du Lévouch. Mais le Ritva tranche que cette Berakha ne peut être récitée que dans les 72 minutes suivant notre passage aux toilettes. Par contre, le Hida, et le Ben Ish Haï tranchent qu’elle ne peut être dite que pendant 30 minutes après s’être rendu aux toilettes. Tel est l’avis du Or LéTsion[52].
Maran Harav Zatsal est du même avis que le Ritva. On ne récitera pas la bénédiction étant donné qu’il y a une discussion entre Maran Harav Zatsal et le Rav Ben Tsion Aba Chaou. On considére cela comme Safék Berakhot Leakel, mais la Halakha est tranchée comme le Ritva.
Conclusion : Une personne qui est allée aux toilettes avant la Tefila de Chaharit et a omis de dire Asher Yatsar, étant donné qu’il n’y a qu’environ une heure qui s’est écoulée, elle pourra dire cette Berakha.
Il est dit aussi dans le traité Nedarim (40a) que ‘’toute personne qui ne va pas visiter un malade c’est comme ci elle avait commis un homicide’’. Considère-t-on réellement cette personne comme une meurtrière ?! Il est évident que nos Sages ont simplement voulu signaler l’importance de la chose.
Certains pensent que la Mitsva de rendre visite à un malade ne s’applique pas lorsque la personne est à l’hôpital, car à cet endroit, le malade est déjà aidé par la famille. Mais d’autres pensent que la Mitsva peut aussi être réalisée dans un hôpital, car en allant la visiter et voir la situation dans laquelle elle se trouve, la personne peut prier avec encore plus de ferveur pour la guérison de cette personne malade. Il n’est pas suffisant de parler avec le malade par téléphone, car la personne ne voit pas de ses yeux sa situation.