Eqev. Les épreuves et les tourments élèvent l’homme

« Il t’a nourri dans ce désert d’une manne inconnue à tes aïeux, car Il voulait t’éprouver par les tribulations pour te rendre heureux à la fin » (Dévarim 8,16)

Le mot « nissayon » [épreuve], explique le ‘Hafets ‘Hayim (dans son commentaire sur la Tora), a deux significations. Dans son sens premier, il désigne le fait que D.ieu « éprouve » l’homme et le soumet à des tests pour contrôler sa fidélité. Mais il existe une seconde acception, mise en relief par le Zohar, selon laquelle le nissayon renvoie à la notion d’« élévation » et de « promotion », comme l’exprime le prophète : « Levez l’étendard [ness] pour les nations » (Icha’ya 62,10).

En réalité, ces deux significations sont complémentaires : lorsqu’un homme triomphe d’une épreuve, il parvient ainsi à exprimer son potentiel et à s’élever à un niveau supérieur. Cette remarque offre une nouvelle dimension à notre verset : « Il voulait t’éprouver par les tribulations pour te rendre heureux à la fin » – l’épreuve des tribulations permit de vérifier la fidélité des Hébreux envers D.ieu, dans le but de les élever et de leur apporter le bonheur.C’est ainsi que D.ieu agit, aussi bien au niveau de la collectivité que du particulier. Lorsqu’Il souhaite élever un homme à un niveau spirituel supérieur, Il le soumet tout d’abord à une épreuve, comme le disent nos Sages : « Le Saint béni soit-Il n’élève personne à la dignité avant de l’avoir testé » (Béréchit Rabba). Et c’est en remportant cette épreuve que l’on parvient à s’élever davantage, comme nous l’enseigne le traité Baba Batra (10b), où rav Yossef raconte avoir entendu dans les Cieux que pas une âme ne peut se tenir à proximité des martyrs de Lod, qui avaient sacrifié leur vie pour la sanctification du Nom divin. Mais cette élévation spirituelle ne s’acquiert pas seulement par le sacrifice de la vie : toute difficulté que l’on

est prêt à endurer pour la gloire de D.ieu est elle-même considérée comme une « épreuve », qui accroît et multiplie la part à laquelle nous aurons droit dans le Monde futur. Le Talmud enseigne en ce sens : « Le Saint béni soit-Il offrit trois beaux présents à Israël, et Il ne les leur donna que par le biais d’épreuves : la Tora, Erets-Israël et le Monde futur » (Bérakhot 5). Il nous incombe de savoir, conclut le ‘Hafets ‘Hayim, que les périodes où l’on sert D.ieu dans la difficulté ont une valeur immuable, nous accordant une rétribution éternelle. Ces moments vécus dans l’épreuve sont considérés comme si l’on s’était alors montré soi-même « généreux » envers D.ieu, comme le confirme cette prophétie : « Je te garde le souvenir de la bonté de ta jeunesse, de ton amour au temps de tes fiançailles, quand tu Me suivais dans le désert, dans une région inculte » (Irmiya 2,2). Dans les annotations Maassé LaMélekh, le rav Chmouel Greinman (auteur du recueil des commentaires du ‘Hafets ‘Hayim sur la Tora) rapporte à ce sujet que, lorsque le ‘Hafets ‘Hayim récitait le Cantique des cantiques, il avait coutume de méditer longuement les versets suivants (5,7-8) : « Les gardes qui font des rondes dans la ville me rencontrent, ils me frappent, me maltraitent ; les gardiens des remparts m’enlèvent ma mantille. Je vous en conjure, ô filles de Jérusalem, si vous rencontrez mon Bien-aimé, que Lui direz-vous ? Que je suis malade d’amour ! »

Et voici comment il les interprétait : tout au long de l’exil, le Juif ne subit qu’affronts et humiliations. Dans toutes les contrées où il se rend, il est perpétuellement malmené. Même ceux qui sont censés « garder l’ordre » n’ont que mépris pour lui. Malgré tout cela, l’amour du Juif pour D.ieu reste indéfectible, il remercie son Créateur autant pour les bienfaits que pour les maux qu’Il lui inflige. Le roi Chlomo, le plus sage d’entre les hommes, dit en ce sens : « Les gardes qui font des rondes dans la ville me rencontrent, ils me frappent, me maltraitent… » – mais en dépit de tous ces supplices – « dites à mon Bien-aimé que je suis toujours malade d’amour » – je L’aime de tout mon cœur et de toute mon âme, et l’amour que je Lui porte depuis toujours est resté intact.

Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.

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