ÊTRE LITTÉRALEMENT L’ARTISAN DE SON COUPLE

Malheureusement ou heureusement, il n'existe aucune recette miracle pour réussir sa vie, son couple notamment. Il existe par contre des principes incontournables. Des principes garantissant que le chemin emprunté est le bon et que les efforts personnels consentis donneront un jour leurs fruits, avec l'aide de D.ieu. Des principes qui, s'ils sont au contraire foulés aux pieds, peuvent coûter beaucoup de temps et de contrariétés… presque pour rien [1].

Le principe fondamental que nous allons évoquer n'est d'ailleurs pas profitable qu'au couple. Il est transposable à bien des facettes de l'existence. Si nous avons choisi de le transposer au couple, c'est que le sujet a de l'importance, au moins pour deux raisons.

La première raison, c'est que l'on entend volontiers parler de « problèmes de couples ». Mais la formulation est-elle vraiment pertinente ? Ne serait-il pas plus juste de considérer le couple à la fois comme un révélateur et un catalyseur des problèmes individuels des époux qui le constituent ? A cause de cette approximation, on oublie trop souvent qu'un couple en souffrance c'est nécessairement deux flux existentiels personnels qui s'affrontent au lieu de s'assembler. On oublie trop souvent qu'un petit « réglage » dans la posture des deux époux, ou même dans la posture d'un époux seulement, suffit à assainir le couple dans on ensemble pour susciter enfin l'harmonie longtemps espérée. Aussi y a-t-il lieu de parler du couple, en tant que thématique qui gagne à être clarifiée.

La seconde raison est plus essentielle encore, puisqu'elle repose sur un enseignement de la Michna :

Dans un endroit où il n'y a pas d'hommes, efforce-toi d'être un homme (Avoth 2,5).

De nos jours, les notions de couple, de mariage, d'éducation et leurs nombreuses implications sont à ce point dénigrées, qu'il faut bien contrebalancer cette tendance malheureuse, même au moyen d'un modeste article…

Il existerait donc un principe éminemment profitable au couple. Pour mieux aider à le garder en mémoire, usons d'une métaphore et imaginons un artisan. Non pas de ces travailleurs qui bâclent leur travail et se focalisent exclusivement sur la rentabilité. Non, un vrai, comme autrefois, un de ceux que l'on s'imagine assis dans son atelier du matin au soir, se consacrant amoureusement à son ouvrage. Entre les mains d'un tel artisan, l'objet n'est-il pas façonné avec attention, sinon avec amour ? Chaque geste est mesuré, précis, utile. Pourquoi cela ? Tout simplement parce que chaque geste a un sens. Ainsi, l'ouvrage est le résultat d'une série de gestes mûrement réfléchis, chacun ayant été accompli au moment opportun

Figurons-nous à présent que l'époux soit à son couple ce que l'artisan est à son ouvrage.

Ne calibrerait-il pas ses paroles et ses gestes ? Ne prendrait-il pas soin de son conjoint tout en ajoutant un embellissement ici, en corrigeant un défaut là ? Comme un de ces artisans d'autrefois, il s'appliquerait non pas à terminer l'ouvrage, encore moins à le terminer rapidement, mais agirait avec le soin de celui qui considère son ouvrage comme unique. Cette idée-là est précieuse, nous semble-t-il. Même si chaque jour il se consacre au même ouvrage, même si chaque jour il côtoie le même conjoint et la même vie de couple, il n'y a ni lassitude, ni mépris, car l'importance de la tâche justifie les efforts qu'elle réclame.

Face à son propre couple, l'époux gagnerait à s'interroger à chaque instant concernant l'acte, la pensée ou la parole alors nécessaires. Donner préséance à la raison, prendre le temps de l'analyse, afin que la décision résultante soit surtout… juste.

C'est ainsi qu'il existe un temps pour détruire, un temps pour construire (Qoheleth 3,3). Dans la vie de couple en particulier, dans la vie en général, il n'est ni fondamentalement bon, ni fondamentalement mauvais de détruire ou bien de construire. Ce qui rend ces démarches tantôt bonnes, tantôt mauvaises, ce n'est pas la démarche en elle-même main bien le temps, à savoir le contexte dans lequel elle s'inscrit. Chlomo haMelekh[2] enseigne qu'il existe un temps pour chaque chose, sous-entendu un temps propice, profitable. Parfois, l'époux, en bon artisan de couple, est conduit à user de rigueur, parfois de patience, parfois de tendresse, parfois d'éloignement, parfois d'humilité. Tout est question de dosage, et ce qui conditionne le dosage, c'est ce fameux temps.

Nous parlons bien là d'un véritable effort de conscience, cet effort sur soi ô combien salutaire, par lequel on empêche une situation de dégénérer et de devenir ingérable. Cet effort qui est l'apanage de ceux qui prennent le temps, au sens où ils se donnent le temps, et l'utilisent à bon escient. C'est le lot de tout époux soucieux d'être l'artisan de son couple et qui, à l'image du sage, n'est pas empressé de répondre (Avoth 5,7). Il n'est pas pressé, car terminer son ouvrage n'est pas l'essentiel. Pour lui, ce qui compte c'est de réussir son ouvrage, avec patience, avec intelligence, et avec ce qu'il faut de passion. Et tant pis, ou plutôt tant mieux si cela prend du temps !

Voici le précieux principe dont nous parlions et qui, à coup sûr, aidera bien des couples à cheminer sur des voies pleines de délices (Michlei 3,17).

David Benkoel est coach et analyste
Pour aller plus loin voir http://www.torahcoach.fr

[1]  Ce qui n'est qu'une formule rhétorique, puisque l'on apprend de ses erreurs. En fait, c'est même uniquement dans l'erreur, la difficulté, le doute, l'épreuve que l'on apprend vraiment.

[2]  Le roi Salomon.

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