« Loth se dirigea du côté oriental » (Béréchit 13,11)
« “Ce qui est tordu ne peut être redressé…” (Qohélet 1) – Rabbi Chim’on bar Yo’haï dit : On ne considère comme “tordu” que celui qui était droit au départ et qui s’est ensuite corrompu. De qui s’agit-il ? De l’érudit qui s’éloigne de la Tora. » (Méguila 9)
Il apparaît de cet extrait du Talmud que tout éloignement de la Tora est considéré comme un terrible manque qu’il est impossible de combler. Rav Aharon Kotler écrit dans son Michnat Rabbi Aharon (p. 142) que Loth – au moment où il quitta son oncle Avraham – nous offre un exemple probant de cet éloignement aux conséquences funestes. Nos Sages associent le départ de Loth au verset : « L’homme qui s’isole ne fait que suivre ses tentations » (Michlé 18), dans la mesure où cette séparation entraîna que sa descendance – les nations de ‘Amon et Moav – s’écarta de D.ieu au point que même après conversion, jamais « un Ammonite ni un Moabite ne seront admis dans l’assemblée de l’Eternel ». Or, bien que la Tora elle-même explique la raison de cet ostracisme [parce qu’ils ne vous ont pas offert le pain et l’eau à votre passage (…) parce qu’il a stipendié contre toi Bil’am], c’est néanmoins cette première divergence qui fut à l’origine de la regrettable évolution de ces nations. Enfin, nous sommes également tenus par l’obligation de ne jamais nous intéresser à leur bien-être et à leur prospérité, et ce, par la faute de leur ancêtre qui s’éloigna délibérément de la Tora.
En réalité, même les différentes formes d’éloignement provisoire – relativement courantes dans notre quotidien – provoquent elles aussi certaines dégradations regrettables. Après avoir vécu à proximité de la Tora, tout éloignement constitue une démarche des plus funestes et des plus dangereuses.Nous retrouvons ce même phénomène précisément chez Loth, lorsqu’il déclara plus tard à l’ange venu le sauver de la mort : « Mais moi, je ne saurais fuir jusque sur la montagne » (Béréchit 19). Les Sages remarquent à ce sujet : « Deux personnes formulèrent les mêmes propos : Loth et la femme de Tsarfat [chez qui le prophète Eliyahou avait trouvé refuge]. La femme de Tsarfat a dit : “Jusqu’à ce que tu viennes à moi, le Saint béni soit-Il voyait mes actions et les actions des gens de ma ville, et mes actions surpassaient les leurs. Mais à présent que tu es venu chez moi, tu as fait ressurgir le souvenir de ma faute” (…) Loth dit : “Avant que je n’aille chez Avraham, le Saint béni soit-Il voyait mes actions et les actions des gens de ma ville. A présent que je me rends chez Avraham, ses actions sont plus nombreuses que les miennes. Je ne pourrai survivre auprès de lui.” C’est à ce propos que le verset dit : “Mais moi, je ne saurais fuir…” »
Or, pendant toutes les années pendant lesquelles Loth vécut auprès d’Avraham, il ne formula à aucun moment ce genre d’appréhensions. Il aurait semblé logique qu’après avoir été informé par les anges du châtiment qui attendait les fauteurs de Sodome et Gomorrhe, Loth ait aspiré à se rapprocher davantage de son oncle et de son enseignement. En outre, lorsque plus tard il fut épargné de la punition qui frappa les villes uniquement par le mérite d’Avraham, il aurait dû désirer ardemment revenir dans le giron du Juste. Cependant, dans la mesure où l’éloignement de la Tora conduit à une corruption qui peut s’avérer irréversible, Loth se vit dans l’incapacité de retourner à son état précédent : être le digne disciple d’Avraham.
Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.