ll y a quelque chose de déroutant dans l'expression “Séder de Pessah”. Quelque chose qui nous rend confus et qui nous fait penser que Pessa'h arrive vraiment et que tout dans notre maison sera organisé.
C'est pourquoi nous travaillons si dur pendant tout ce temps, pour que l'ordre règne enfin !
Mais, une maison avec des enfants, une maison bénie, ne répond pas toujours à ces critères d’ordre…
Il suffit de plier le linge et il y en a encore plus,
Je termine juste le repas que je prépare déjà le prochain,
Je nettoie les fenêtres, elles sont à nouveau sales,
Je passe le balai et les miettes sont, d'un coup, plus nombreuses…
En entendant les mots ''Nuit du Séder'', nous sommes donc déroutés…
Nous aimons tellement que tout soit en ordre que nous pensons, à tort, que cette pièce, si belle à présent -et qui rendrait jaloux les magazines déco-, restera très bien rangée, avec les vêtements en place dans les placards tels des soldats à l’appel, du moins jusqu’à Pessa'h. Et ce qui nous rend fous c'est quand, le lendemain matin, nous trouvons les jouets au sol et que nous nous surprenons à hurler : “Les enfants ! Qui a encore laissé trainer les jouets ?”
N’est ce pas normal de déverser notre fureur sur les enfants ?
Il nous reste encore un peu de temps avant le soir du Séder.
Pendant ces quelques jours, nous nous devons de détruire le 'Hamets.
Il ne nous est pas demandé de nous rendre malade pour extraire le ‘Hamets. Seulement de faire le nécessaire. Il ne nous est pas demandé non plus de préserver comme une pièce de musée la partie déjà nettoyée.
Alors oui, nettoyons la maison de tout 'Hamets mais laissons les chambres un peu vivre ! Laissons-les (légèrement) en désordre, laissons la vie y entrer. Faisons juste attention à ce que le 'Hamets n'entre pas. C'est cela qui compte réellement.
A la veille de Pessa'h, nous savons d'avance que, à l’approche du Seder, il n'y aura aucun 'Hamets chez nous après les nombreux efforts que nous avons fournis pour l'enlever. Mais de l'ordre, y en aura t-il ? Il n'est pas certain que nous y parviendrons.
Le linge sera plié et rangé, peut-être même avant le début de la fête. Les enfants reviendront après observé longuement le 'Hamets brûler dans le feu.
Les quelques jouets qui traîneront sur le sol auront vite retrouvé tous leurs amis : les enfants et une journée de vacance font bon ménage. Ils auront raison de nous et ne laisseront pas un endroit où l'on pourra apercevoir la couleur du carrelage.
Les vêtements propres mais que nous n'aurons pas eu le temps de plier s'empileront sur le canapé du salon.
Tout ce que nous aurons acheté comme nourriture pour Pessa'h et que nous avons bien rangé dans les placards se retrouvera éparpillé un peu partout sur le plan de travail de la cuisine et sur la table du salon.
Les paquets de Matsot pour lesquels nous n'avons pas trouvé de place seront entassés dans un coin du salon.
Ainsi, donc, de l'ordre, ce n'est pas sûr qu'il y en aura.
Le 'Hamets quant à lui, avec l'aide d'Hachem, ne sera ''ni vu, ni trouvé''.
Et avec le Séder de Pessa'h, commencera le désordre :
Les enfants se seront à peine revêtus de leurs habits de fête qu'ils seront déjà partis prier avec leur père. Les petits joueront à côté de la synagogue pendant le Dvar Torah et, une fois rentrés, nous aurons du mal à croire qu'un jour, leurs chemises furent blanches.
Pour s'asseoir autour de la table, c'est la fête : qui va s'asseoir à côté de maman ?
L'un ricane pendant le Kiddouch. L'autre pousse son frère. Le vin se renverse sur la nouvelle nappe de Pessa'h et sur le costume du grand frère.
L'un pleure, l'autre crie, celle-ci veut aller dormir. Et le Séder doit continuer.
Quel Séder ?
Et nous qui pensions que tout serait en ordre une fois le Séder arrivé !
ll y a quelque chose de déroutant dans l'expression “Séder de Pessah”. Quelque chose qui nous rend confus et qui nous fait penser que tout doit être en ordre.
Mais ce n'est pas le cas.
Une maison avec des enfants est une maison qui n’est pas toujours ordonnée. C'est justement là sa beauté.
Tout au long de l'année, nous, parents, essayons de suivre des cours et d’apprendre pour mieux éduquer nos enfants. Nous essayons de leur enseigner l'ordre, comme nous l'aimons.
Parfois, ça marche. Parfois moins.
Alors oui, dans certaines maisons, tout est rangé, les enfants sont toujours tirés à quatre épingles, et les parents ont sacrifié toute leur vie pour cela. Et dans certaines maisons, même le soir du Séder, il n'y a pas de Séder.
Essayons d'accepter notre maison, notre famille et nous-mêmes tels que nous sommes.
Et si nous nous sentions enfin harmonie avec nous-mêmes ce soir-là ?
Et si on se sentait vraiment BéSéder (litt : en ordre) le soir du Séder ? Même si le Séder ne règne que dans la chanson Kadech, Ourhats, Karpass, Yahats et pas dans un seul mètre carré de notre maison…