Le Rav Yehuda David Eisenstein écrit: [1] «celui qui prend de l'argent ou des biens à son voisin dans l'intention de lui rembourser leur valeur est appelé emprunteur « לווה ». Celui qui donne l'argent ou les biens à son prochain est appelé prêteur « מלווה ». L'argent ou les biens transmis du prêteur à l'emprunteur sont appelés emprunt « הלוואה ». C'est un commandement biblique de prêter de l'argent au peuple d'Israël, comme il est écrit (Exode 22, 24): « Si tu prêteras de l'argent à mon peuple, au pauvre qui est avec toi » [2]. Maïmonide écrit que ce commandement est « plus grave et plus important que la charité. Celui dont l'incapacité de subvenir à ses besoins est déjà connu ne souffre pas autant dans ses demandes que celui qui fait tout pour se sortir de sa situation de détresse sans que son malheur ne se sache » [3]. Ce commandement est tellement sublime qu'il est rapporté à ce sujet dans le Midrash: “Dieu dit, Si tu prêtes de l'argent à mon peuple, tu mériteras ma proximité »[4].
Il y'a une interdiction d'imposer des intérêts sur l'argent, et, il est aussi interdit d'oppresser le pauvre s'il est dans l'incapacité de rembourser. Comme il est dit dans la Torah: “Tu ne seras pas pour lui comme un usurier” (Exode 22, 24), « Et lorsque ton frère deviendra pauvre, et que sa main décline auprès de toi, tu le soutiendras, étranger et habitant, il vivra avec toi. Ne prends de lui ni intérêt ni usure, tu auras la crainte de ton Eloqim, et que vive ton frère avec toi. Ton argent tu ne le lui donneras pas à intérêt, et tu ne lui donneras pas à usure ta nourriture. » (Lévitique 25, 35-37). Maïmonide explique l'interdiction de prendre des intérêts et l'interdiction d'oppresser les pauvres. [5] « Tout celui qui oppresse un pauvre, sachant qu'il n'a pas de quoi le rembourser transgresse une mitsva négative “Tu ne seras pas pour lui comme un usurier” » (Exode 22, 24). L'usure est appelée dans la Torah נשך, une morsure, « car celui qui prend des intérêts fait souffrir son prochain et mange de sa chair ».
De la même manière qu'il est interdit au préteur de demander des intérêts, ainsi il est interdit au débiteur de verser un intérêt au créancier. C'est ce qui est dit dans le verset « Tu n'inciteras pas ton frère à l'intérêt » (Deutéronome 23, 20). Nos sages ont expliqué que ce verset concernait l'interdiction faite à l'emprunteur d'accepter un prêt à intérêts. Il est également prohibé d'aider de quelque manière que ce soit à la réalisation d'une telle transaction comme il est dit « Vous n'imposerez pas sur lui d'intérêts » (Exode 22, 24). Ce verset met en garde contre de tels agissements même le scribe, les témoins ou les garants. Maimonide a usé de mots très durs en jugeant que « Tout celui qui écrit un contrat comportant des intérêts, est considéré comme mettant par écrit et certifiant par des témoins, son déni de Dieu. Même lorsqu'il n'a pas été fait de contrat, le prêteur et l'emprunteur nient par leurs actions le Dieu d'Israël et la sortie d'Egypte. En effet, il est dit “Ton argent tu ne le lui donneras pas à intérêt… Je suis l'Éternel, votre Dieu, qui vous ai fait sortir du pays d'Egypte”(Lévitique 25, 37-38) » [6].
Rabbi Samson Raphaël Hirsch (dans son commentaire sur l'Exode 22, 24) écrit que «la Torah fait du prêt sans intérêt la mitsva la plus importante dans les relations sociales. La Torah protège l'emprunteur pour qu'il n'ait pas à souffrir de trop de rigidité du prêteur. Elle interdit également au créancier de faire honte à son débiteur. « Bien que la Torah ait pitié de l'emprunteur, sa position est claire concernant l'obligation absolue du débiteur de rembourser sa dette. L'emprunteur qui a de quoi rembourser et s'y refuse est appelé mécréant (Psaumes, 37, 21): “emprunteur mécréant qui ne rembourse pas” ». Maïmonide a statué: [7] «Lorsque le prêteur réclame sa créance, même s'il est riche et que l'emprunteur est dans une situation difficile – il ne faudra pas avoir pitié dans le jugement, mais l'accusé paiera sa dette jusqu'au dernier sou». Il est intéressant de finir cet article avec les paroles de Rav Ezra Basri, qui a écrit sur l'importance du respect cette mitsva. « Il n'est nulle nécessité de s'étendre sur l'importance de cette mitsva, puisque presque chacun, a dû un jour emprunter de l'argent. Combien de honte et de chagrin y'a-t-il lorsque quelqu’un demande un prêt et qu'il lui est refusé. Lorsqu'une demande de prêt nous parviendra et que nous serons en mesure de la satisfaire, il faudra s'efforcer de le faire. Si l'on craint de ne pas être remboursé, on pourra demander un gage ou un garant. » [8]
[1] הרב יהודה דוד איזנשטיין, אוצר דינים ומנהגים, ערך 'לוה ומלוה', עמ' 188.
[2] ראה: רמב”ם, משנה תורה, הלכות לווה ומלווה, פרק א, הלכה א; ורש”י בביאורו לפסוק כתב: “אם כסף תלוה את עמי – רבי ישמעאל אומר: כל אִם וְאִם שבתורה רשות, חוץ משלושה וזה אחד מהן”. היינו, מצווה זו היא חובה ולא רשות.
[3] הרמב”ם, ספר המצוות, מצוות עשה קצז, מהדורת הרב יוסף קאפח.
[4] מדרש תנחומא, פרשת משפטים, סימן טו.
[5] ראה: רמב”ם, משנה תורה, הלכות לווה ומלווה, פרק א, הלכה ב. ופרק ד, הלכות א-ב.
[6] רמב”ם, משנה תורה, הלכות לווה ומלווה, פרק ד, הלכה ז.
[7] רמב”ם, משנה תורה, הלכות לווה ומלווה, פרק א ד.
[8] הרב עזרא בצרי, דיני ממונות, חלק א, מהדורת התש”ן, עמ' תל.