Suite de la semaine dernière
Nous avons dit dans le cours précédent qu’une femme ne prend pas sur elle le Chabbat par le seul fait de l’allumage. Mais la coutume ashkénaze est différente à ce niveau-là. Cependant, une femme séfarade, peut volontairement prendre le Chabbat par l’allumage en se détachant de tout travail interdit, comme certaines femmes Tsadkanyot qui, après l’allumage font leurs prières, ou lisent le Chir Hachirim.
De même, un homme habitant seul à la maison, car il est célibataire ou veuf, a lui-aussi l’obligation d’allumer les bougies de Chabbat il peut donc tout à fait accepter le Chabbat par l’allumage, en se détachant de tout travail interdit.
Comment faire ?
Si une femme, après avoir pris volontairement le Chabbat par l’allumage, se rend compte que la plata n’est pas allumée ? Ou que le gaz n’est pas allumé (certains en guise de plata, posent une plaque en métal sur les bruleurs allumés). Ou en encore que le chauffe-eau est allumé (occasionnant une perte d’argent, et même un risque d’explosion d’un ancien chauffe-eau). Est-ce que cette femme aura le droit de demander à l’un des membres de la famille de faire le nécessaire, ou sont-ils, eux aussi concernés par la prise du Chabbat ?
Les Poskim débâtent à ce sujet, mais la halakha a tranché que le reste de la maison n’est pas concerné par la prise du Chabbat par l’allumage, et même si cette femme a pris le Chabbat sur elle, elle pourra demander de réaliser l’action en question. C’est l’avis du Choulhan Aroukh (Siman 263 Halakha 17). Même si les termes utilisés par le Choulhan Aroukh sont « Yesh Omrim (certains disent) », c’est son avis, car c’est le seul avis qu’il rapporte. D’ailleurs, il faut savoir que cette halakha rapportée par le Beth Yossef à pour source le Rashba (traité Chabbat 151a). Mais il en va autrement pour le Rane (64b) qui tranche que dès lors qu’un travail est interdit pour elle, elle n’a pas le droit de demander de la faire à quelqu’un qui n’a pas encore pris chabbat sur lui. Mais comme nous l’avons dit, le Beth Yossef contredit cet avis, et tient la halakha comme le Rashba.
[Dans notre cas, même si le Choulhan Aroukh rapporte l’avis du Rashba sous les termes « Yesh Omrim », la halakha est tranchée comme telle, car c’est le seul avis rapporté par le Choulhan Aroukh. D’ailleurs, on peut retrouver d’autres Kllalim, nous permettant de comprendre la lecture du Choulhan Aroukh. Par exemple, lorsque le Choulhan Aroukh rapporte deux avis sous les termes « Yesh Omrim », la halakha est tranchée comme le second. Ou encore, lorsque le Choulhan Aroukh rapporte l’avis simple (Stam) et en second, l’avis « Certains disent Yesh Omrim », la halakha est fixée comme l’avis simple (Stam), sans craindre à aucun moment le second. Tel est l’avis du Ram’a miPano disant que lorsque le Choulhan Aroukh rapporte un second avis « Yesh Omrim », c’est uniquement pour honorer le second avis et non craindre cet avis (responsa Siman 97. Il vécut à l’époque de Maran Hachoulhan Aroukh, et s’occupa même de l’impression de ses livres. Lorsque le Choulhan Aroukh rendit l’âme, le Ram’a miPano était âgé de 30 ans)]
C’est interdit de demander pendant Chabbat
On peut alors s’interroger comment peut-on permettre à cette femme de demander à son mari de réaliser un interdit (pour elle par le fait qu’elle ait pris Chabbat) alors que durant Chabbat il est même interdit de demander à un non-juif de réaliser pour nous un interdit ? Le Beth Yossef (fin du Siman 263) répond que dans notre cas c’est différent, car le fait d’avoir pris Chabbat ne relève que de son propre choix. Comme dans le cas où pendant chabbat, il est permis à un homme de demander à son ami de garder ses fruits, qui se trouve dans sa zone autorisée[1]. En effet, dans l’absolu, dans le cas où il y aurait eu des habitations en cabane, le propriétaire des fruits aurait pu lui-même s’y rendre[2]. Il en sera de même pour une femme qui allume les bougies et prend sur elle le Chabbat, alors qu’elle aurait pu ne pas accepter le Chabbat par l’allumage. Et ce même pour une femme ashkénaze, car elle aurait pu allumer plus tard ou bien en émettant une condition avant l’allumage qu’elle ne fait pas entrer le Chabbat par l’allumage.
Le Ba’h ainsi que son gendre, le Ta’z, ne sont pas d’accord avec l’explication du Beth Yossef et donnent une explication différente. L’interdit n’est mis en place que lorsque l’interdit concerne la totalité, mais lorsqu’il ne concerne qu’un particulier, c’est permis pour cette même personne de demander à réaliser un interdit. On peut aussi ajouter que l’on a l’interdiction de demander à un non-juif pendant Chabbat, mais on n’a pas encore vu l’interdiction de demander à un juif quand c’est permis pour lui.
La sortie comme l’entrée
Lorsque sort Chabbat[3] si une personne est encore pendant la Sé’oudat Chlichite, elle aura le droit de profiter d’un travail réalisé par une autre personne a déjà prié Arvit en ajoutant le passage de « Ata ‘honantanou ». Une loi similaire s’applique à la veille de Chabbat, dans le cas où quelqu’un a déjà accepté le Chabbat, il aura le droit de profiter d’un travail réalisé par une tierce personne. Cependant Rabbi Haïm Faladji[4] rajoute, que c’est seulement dans le cas où la personne qui a fini Chabbat (il a fait Arvit en ajoutant le passage de la sortie de Chabbat), a réalisé le travail pour lui-même. De plus, à l’entrée de Chabbat, il sera préférable à celui qui a déjà fait entrer le Chabbat d’être plus rigoureux et de ne pas « demander » à ce qu’on réalise pour lui un interdit.
Mais Maran Harav Zatsal, dans son responsa Yabi’a Omer[5] contredit cet avis, disant que lorsqu’il dit «seulement dans le cas où la personne qui a fini Chabbat (il a fait Arvit en ajoutant le passage de la sortie de Chabbat), a réalisé le travail pour lui-même », la halakha n’est pas comme cela, et donc, même si l’action est réalisée pour quelqu’un d’autre seulement. Rabbi Haïm Faladji ajoute « De plus, à l’entrée de Chabbat, il sera préférable à celui qui a déjà fait entrer le Chabbat d’être plus rigoureux et de ne pas « demander » à ce qu’on réalise pour lui un interdit ». En fin de compte, nous appliquons les halakhot du Choulhan Aroukh qui tranche la halakha comme le Rashba[6] et il n’y a pas à être plus rigoureux que ce que nous enseigne le Choulhan Aroukh[7].
Parenthèse
L’admission des halakhot du Choulhan Aroukh
Quelqu’un écrit dans son livre, un long commentaire disant que nous avons accepté les décisions halakhiques du Choulhan Aroukh uniquement pour être plus stricts, alors que lorsque le Choulhan Aroukh tranche la halakha de manière plus souple, on ne prendra pas sur son avis, et on enseignera au public, d’être plus rigoureux. Apparemment, cette personne à sur quoi se tenir. En effet, nous venons de citer au nom de Rabbi Haïm Faladji, que même si le Choulhan Aroukh autorise une personne qui a déjà fait entrer le Chabbat, de demander à un autre juif de réaliser pour lui, un travail interdit, il sera préférable qu’il soit plus strict.
Mais on ne peut pas tirer de preuve de cela, car Rabbi Haïm Faladji dit uniquement « Il sera préférable d’être plus strict » sans pour autant trancher que c’est « interdit ». Son intention n’était donc pas d’enseigner au public d’être plus strict. Donc l’explication, de celui qui écrit cela n’est pas compréhensible. N’a-t-on pas accepté l’avis du Choulhan Aroukh dans son ensemble ?! Y a-t-il plus grand que Maran HaChoulhan Aroukh, sur lequel il est écrit de manière exceptionnelle dans le livre Maguid Mécharim[8]. Dans sa Tshouva[9] le Rama l’interroge et écrit sur lui : « Notre maitre, où préside sur lui la Divinité, que ne plaise de défier les paroles de son honneur. Celui qui conteste ses paroles est similaire au fait de contester la Divinité ».
Autre contestation de cet écrivain
Il apporte une autre preuve concernant le fait que nous devons être plus stricts, même à l’encontre du Choulhan Aroukh. Il rapporte dans le livre Eretz Haïm Sitone[10] au nom du livre HaChomér Emeth[11] que la coutume est de rouler le parchemin du Sefer Torah, alors qu’il se trouve dans son enveloppe, mais que si seulement on souhaite rouler le Sefer Torah du début jusqu’à la fin, alors on devra tout d’abord le sortir de son enveloppe. Cette halakha contredit l’avis du Beth Yossef[12], qui rapporte au nom du Rivash[13], qu’on ne devra pas enrouler le parchemin dans son enveloppe, mais on devra le sortir tout d’abord, car la couture des parchemins peut se couper, et le verset nous dit (Devarim 12, 4) : « Vous ne ferez point de la sorte à Hachem votre D. ». C’est tranché de cette façon dans le Choulhan Aroukh[14]. De là, cette même personne tient que nous ne tenons pas la halakha comme le Choulhan Aroukh lorsqu’il tranche la halakha de manière souple. En effet, certains pensent que nous devons enrouler le parchemin uniquement dans son enveloppe, et notre coutume suit cet avis.
Après avoir vu cela, je me suis dit que j’allais vérifier les sources en question. Après avoir vu, je fus stupéfait de voir que cette personne rapporta des preuves totalement erronées[15] ! En effet, dans la source rapportée, Eretz Haïm Sitone, le Rav explique ses propos selon deux raisons (pour quelle raison ne suivons-nous pas l’avis du Choulhan Aroukh en ce qui concerne le fait d’enrouler le parchemin du Sefer Torah, à l’intérieure de son enveloppe ?) : « il se peut qu’il s’agisse d’une coutume datant, sur lesquelles le Choulhan Aroukh lui-même dit qu’il ne vient en aucun cas supprimer des coutumes datant d’avant ses halakhot[16], comme nous l’avons expliqué dans les Kllalim[17]. De plus, tout l’interdit se pose lorsque le Sefer Torah est allongé dans son enveloppe. Dans ce cas-là, on peut craindre que les coutures se déchirent, si on ne sort pas pour l’enrouler. Mais lorsque le Sefer Torah est en position debout dans son enveloppe, on ne craindra pas qu’il se déchire[18].
Donc, on ne peut en aucun cas tirer une preuve de là. Ce même écrivain savait pertinemment que s’il continuait les propos du Eretz Haïm Sitone, on aurait su que ce n’est pas une preuve à ses propos.
Encore une autre contestation
Il rapporta encore une autre preuve à ses propos, du Sdé ‘Héméd[19] qui pense que si la majeure partie des Poskim tranche la halakha de manière stricte, dans le cas où il n’y a pas de grande perte, il sera bien de suivre leur avis. Fin de citation. De là, il affirme que nous devons être plus stricts, même à l’encontre du Choulhan Aroukh.
Tout d’abord, celui qui a l’habitude de lire le Beth Yossef peut témoigner que le Choulhan Aroukh tranche comme la majorité des Poskim et le Rama, suit en général la minorité. Et même si on trouve un cas où le Choulhan Aroukh suit la minorité, le Sdé ‘Héméd lui-même utilise le terme « il sera bien de suivre leur avis », ce n’est donc pas obligatoire, même selon cet avis. C’est-à-dire, que dans le cas où il n’y a pas de perte et que la majeure partie des Poskim tranche que l’on doit être plus stricte, il sera bien de les suivre, selon le Sdé ‘Héméd.
Plus souple et plus rigoureux, la halakha comme le Choulhan Aroukh
Mis à part cela, il faut savoir que tous les Grands A’haronim ont écrit que nous avons pris les décisions halakhiques du Choulhan Aroukh. Personne n’a les capacités de contredire tous ces A’haronim.
Le Grand Rabbin d’Israël, le Gaon Rabbi Yossef Hazan[20], dans son responsa Hikrei Lév[21], écrit que seulement un érudit chez lui à la maison, en cachette, pourra être plus strict pour lui-même que le Choulhan Aroukh. Mais un enseignant ou un juge halakhique devront obligatoirement enseigner et juger selon les décisions du Choulhan Aroukh. Il n’aura pas le droit d’enseigner, d’être plus strict que le Choulhan Aroukh.
De l’avis du Gaon Rabbi Chlomo Laniado[22] dans son responsa Beth Dino chél Chlomo[23] nous avons accepté les lois du Choulhan Aroukh, que ce soit dans un cas où l’on doit être plus strict ou bien plus souple.
Tel est l’avis du Maharit Elgazi[24] dans son livre Simhat Yom Tov[25] ajoutant, « ‘Hallila d’enseigner différemment du Choulhan Aroukh ».
Le Grand Rabbin d’Israël, Rabbi Mordehai Yossef Myou’hass[26] , dans son livre Chaar Hamayim[27], écrit que toutes les décisions halakhiques du Choulhan Aroukh furent acceptées par 200 Rabbanims. Nous le suivons, que ce soit pour être plus souple ou plus rigoureux.
C’est l’avis du Gaon Rabbi Chaoul Yehochoua Abitbol[28] dans son livre Avné Chayich[29].
C’est aussi l’avis du Gaon Rabbi Avraham Antabi[30] dans son responsa Mor Véaoloth[31].
Ainsi que du Gaon Rabbi Haïm Faladji[32] dans son responsa ‘Hikéké lév[33] ainsi que dans le livre Guinzé Haïm[34]. (NB : voir dans l’introduction du livre Beth Maran, où nous avons rapporté 133 A’haronim suivant cet avis).
Le Ben Ish Haï, le Hida et le Kaf Ha’haïm
Cette même personne affirme que le Hida, le Rabbi Yaakov Soffer (auteur du Kaf Ha’Haïm) et le Ben Ish Haï sont plus rigoureux que l’avis du Choulhan Aroukh dans plusieurs endroits.
Tout d’abord il faut savoir que même s’ils ont été plus rigoureux dans certains endroits, eux-mêmes écrivent que l’on doit suivre l’avis du Choulhan Aroukh. Ainsi le Ben Ish Haï écrit dans son livre Rav Pé’alim[35] : « même s’il y a 100 A’haronims qui contredisent l’avis du Choulhan Aroukh, on ne se tiendra pas sur eux, même en cas de grandes pertes, car nous sommes dans l’obligation de suivre le Choulhan Aroukh etc. » fin de citation. Le Ben Ish Haï, revient sur cela à plusieurs reprises dans ses écrits, même si lui-même est plus strict dans certains cas[36]. Alors, comment l’expliquer ? Et bien il faut savoir que le Hida, le Ben Ish Haï et le Kaf Ha’Haïm étaient des Hassidim suivant la Kabbala. De plus, même si le Hida lui-même est plus rigoureux dans certains endroits, c’était uniquement pour lui-même et pour les Talmidei Hakhamim qui lisent ses livres, et qui s’ils le souhaitent, peuvent être plus rigoureux pour eux chez eux. Mais pour tout le public, il enseignait l’avis du Choulhan Aroukh.
Fermons la parenthèse
Demander à son ami après avoir pris Chabbat
Le verset nous dit[37]: « de t’occuper de tes intérêts et d’en faire le sujet de tes discussions », c’est-à-dire qu’on n’a pas le droit durant Chabbat de s’occuper de chose futile ni même de parler de choses qui concernent la semaine. Selon cela, comment une personne qui a pris sur elle le Chabbat, peut-elle demander à un autre juif (qui n’a pas encore pris Chabbat) de réaliser pour elle un travail ? N’est-il pas interdit pendant Chabbat de parler de choses qui concernent la semaine ? D’ailleurs dans le traité Avoda Zara[38], Rachi dit à partir de ce verset, qu’il est défendu durant Chabbat de demander à un non-juif, de réaliser un interdit de Chabbat. Il est vrai, que sur cette interrogation, certains A’haronim ont débattu, mais ils n’ont pas ouvert le Rashba, qui fait bien une différence entre un juif et un non-juif : Étant donné que la veille de Chabbat, l’interdit de réaliser un travail interdit n’est pas pour tout le monde (certains n’ont pas encore pris le Chabbat), il est donc permis de demander à un autre juif de réaliser un travail.
Autre raison de l’interdit de demander à un non-juif
Cependant, il existe une autre explication sur l’interdit de demander le service d’un non-juif pendant Chabbat. En effet, Rachi dans le traité Chabbat[39] explique que cet interdit est du fait que l’on considère la « course réalisée » par un non-juif[40]. Et donc, on peut considérer l’acte réalisé comme si nous-mêmes l’avions réalisé personnellement. Donc, dans notre cas, comment est-il possible de demander à un autre juif qui n’a pas encore pris Chabbat, de réaliser un travail à notre place ? On peut répondre que tout ce qu’a pris sur lui la personne en acceptant le Chabbat ce sont les travaux qui sont réalisés par sa propre personne, mais pas les choses réalisées par un tiers. En fin de compte, il n’aura rien fait de ses propres mains et c’est donc permis.
Le Kiddouch dans une maison de retraite
Rabbi Akiva Iguére s’interroge au sujet d’une personne qui n’a pas encore pris Chabbat pour savoir s’il peut rendre quitte du Kiddouch des personnes ayant déjà pris le Chabbat. Par exemple, dans une maison de retraite où les personnes âgées dorment tôt. Aucun d’entre eux n’a les capacités de faire le Kiddouch. Est-ce qu’une personne n’ayant pas encore accepté le Chabbat peut les rendre quittes du Kiddouch ? Il rapporta comme preuve le Yerouchalmi[41] disant qu’un habitant d’une autre ville ne peut rendre quitte de la lecture de la Méguila ceux qui lisent le 15 (Jérusalem), car il n’a plus la Mitsva de lire la Méguila. Mais il reste en suspens, sur la question du Kiddouch, car en fin de compte la preuve du Yerouchalmi peut être repoussée par le fait que la personne peut dans ce cas-là, se rendre obligée du Kiddouch en faisant rentrer le Chabbat. Ce qui n’est pas le cas de la lecture de la Méguila, car il a déjà accompli la Mitsva et ne peut se rendre obligé à nouveau.
Quant au Gaon Rabbi Eliezer Yehouda Veldinberg, dans son responsa Tsitz Eliezer[42], il pense, que de même qu’une personne qui s’est déjà rendue quitte du Kiddouch peut rendre quitte d’autres personnes, selon le principe d’Arvout[43], car en fin de compte il a en général l’obligation d’accomplir la Mitsva du Kiddouch (Bar ‘Hiyouva). Il en sera de même pour une personne qui n’a pas encore pris Chabbat.
Point associé pour être plus souple : promesse ou pas
Mis à part tous les points que nous avons apportés plus haut, selon lesquels une personne qui a pris sur elle Chabbat peut demander à son ami de réaliser pour elle un travail, nous pouvons ajouter autre chose. : Est-ce qu’avoir pris Chabbat est soumis aux règles de la promesse ou pas ? Si on considère l’acceptation du Chabbat comme étant une promesse (vœux), alors cette personne pourrait demander à ce qu’on lui fasse une annulation de vœux. Elle pourrait ainsi, réaliser un travail. Par exemple, si une femme se rend compte qu’elle a omis de préparer le poisson pour Chabbat et qu’à la maison, personne ne sait le préparer[44], peut-elle demander qu’on lui annule sa promesse, pour qu’elle puisse ainsi préparer son Chabbat ?
Et bien, il y a une discussion dans les A’haronim à ce sujet. Selon le Lévouch, la prise du Chabbat est « une promesse (vœu) » faite. Par extension l’annulation peut être accomplie. Cependant, le Magen Avraham contredit cet avis. Le Aroukh HaChoulhan aussi est du même avis que le Magen Avraham. Tel est l’avis Gaon Milissa dans son responsa Mekor Haïm et du Gaon HaRav Moché Feinschteine dans son responsa Igrot Moché.
En revanche, le Lévouch est suivi du Elia Rabba qui suit son même avis. Tel est aussi l’avis du responsa Yad Its’hak, du Hatam Soffer, du responsa Choél Ouméchiv et du responsa Torah Lichma du Gaon Rabbénou Yossef Haïm (ben Ish Haï).
Ainsi, nous pouvons associer ce point-là, pour autoriser cette personne à demander le service d’une autre personne, car il a entre ses mains, la possibilité de faire Atarath Nédarim (l’annulation de sa promesse).
L’avis Moussari du Betzel Ha’hokhma
Le Gaon Rabbi Betzalel Chtérén Zatsal, dans son livre Betzel Ha’hokhma tranche qu’une personne qui a pris sur elle le Chabbat, et se rend compte qu’elle aurait pu signer un contrat important, ne peut revenir sur cela, et ne signera pas, car la Mitsva de la prise du Chabbat doit être faite « de tout ton pouvoir » (Devarim 6, 5). Et ce, même s’il y a une perte d’argent.
Mais celui qui a posé la question aurait pu le « poursuivre » au Beth Din : pourquoi avoir tranché comme cela la halakha alors que tous les A’haronim contredisent le Magen Avraham !
Deuxième jour de Yom Tov
Le responsa Oalei Yaakov s’interroge pour pour savoir si le second jour de Yom Tov, si un habitant d’en dehors d’Israël peut lui demander à un Israélien se trouvant en dehors d’Israël de faire pour lui un travail interdit en cachette ? D’ailleurs, il faut savoir que le Beth Yossef ainsi que le Mavit tranchent qu’un Israélien peut réaliser des choses interdites le second jour de Yom Tov en dehors d’Israël, mais uniquement en cachette[45]. Le second jour de Yom Tov, un Israélien, doit mettre ses Tefiline[46] dans sa chambre, doit faire sa Tefila de la semaine et ne doit pas faire le Kiddouch.
Le Maharikach tranche par ailleurs, qu’un habitant d’en dehors d’Israël se trouvant en Israël (et qui a l’intention de retourner vivre en dehors d’Israël), peut demander le service d’un Israélien. En effet, il se tient sur ce que nous avons dit plus haut : de même qu’il est permis pour une personne qui a pris Chabbat de demander le service de son ami (n’ayant pas encore pris le Chabbat), car cette personne aurait pu ne pas prendre le Chabbat plus tôt. De même pour cette personne, il a la possibilité de vivre en Israël, et pouvoir par extension, réaliser lui-même ce travail. Mais cette comparaison est un peu dure à accepter, car difficile à croire qu’il soit prêt à venir habiter en Israël. Le Hida, dans son livre Birkei Yossef tranche lui aussi, qu’il est permis pour un habitant d’en dehors d’Israël de demander le service d’un Israélien. Il rapporte l’avis de Rabbi Yaakov Fradji[47] et du Mahari Molkho qui contredisent cela, mais le Hida lui-même est d’avis plus souple.
Qu’en est-il de la halakha ?
Le Hakham Tsvi[48] tranche qu’un habitant d’en dehors d’Israël qui vient en Israël pour les fêtes, devra se comporter comme un Israélien et ne pas faire le deuxième jour de Yom Tov. Maran HaBeth Yossef, dans son livre Avkat Rokhél[49] ne tranche pas de la sorte et pense qu’il doit faire son deuxième jour de Yom Tov. Même si c’est la halakha car nous suivons l’avis du Choulhan Aroukh, l’avis du Hakham Tsvi doit être pris en considération, pour notre interrogation de départ : peut-il demander le service d’un Israélien ?
C’est pour cela, qu’un habitant d’en dehors d’Israël peut demander à un Israélien qu’on lui réalise un travail, et ce que ce soit en Israël, ou bien en dehors d’Israël en cachette (si l’Israélien se trouve en dehors d’Israël pour le second jour de Yom tov).
L’avis de Maran Harav Zatsal était plutôt d’être plus strict, comme nous pouvons le voir dans sa lettre de recommandation du livre Hokhma OuMoussar de Rabbi Avraham Antabi. Ainsi que dans le Yalkout Yossef[50], qui est sorti il y a 26 ans, car nous sommes liés aux halakhot de Maran Harav Zatsal. Mais dans son responsa Yabia Omer[51], il revint sur sa décision, et son avis est plus souple.
C’est pour cela, que dans le Yalkout Yossef qui est sorti il y a quelques années nous avons fait mettre une petite étoile[52] pour signifier ce changement.
D’ailleurs, pour cette même raison, nous avons l’habitude de faire les Kapparot, la veille de Kippour, à l’encontre de l’avis du Choulhan Aroukh (Siman 605 Halakha 1) : il s’agit d’une coutume plus ancienne que le Choulhan Aroukh.