« L’Eternel appela Moché et lui parla depuis la Tente d’assignation en ces termes… » (Vayiqra 1,1)
« Nos Sages déduisent de ce verset que tout érudit dépourvu de sagesse est pire qu’une charogne. » (Midrach Rabba)
Le Sforno commente ce verset de la manière suivante : « “L’Eternel appela Moché“ – Il l’appelait invariablement du sein des nuées, ainsi qu’Il le fit au mont Sinaï, comme il est dit : “Il appela Moché au septième jour, du milieu des nuées.“ Car jamais Moché ne pénétrait [dans le Sanctuaire] sans autorisation. »Selon rav Yérou’ham Leibovitz (Da’at Tora), l’attitude noble de Moché, ainsi que les conclusions que nos Sages en déduisent – à savoir que « tout érudit dépourvu de sagesse est pire qu’une charogne » –, nous permettent de mieux cerner la notion de « sagesse ».Dans son Messilat Yécharim (chap.2), le Ram’hal détaille les principes de la vertu de vigilance. Il cite à ce sujet les propos du Talmud (Bérakhot 33a) :
« Il est interdit de se montrer clément envers une personne dénuée de sagesse. » Le lien entre la vigilance et la sagesse s’explique, d’après le Ram’hal, de la manière suivante : « Le principe de vigilance consiste, pour chacun, à scruter et examiner ses faits et gestes […] afin qu’il ne suive pas ses habitudes comme un aveugle marchant dans l’obscurité… » Au chapitre 3, il conclut ainsi : « La justesse de ce conseil ne pourra être expliquée qu’à ceux qui, libérés de l’emprise de leur mauvais penchant, le dominent et le maîtrisent. Seuls ces hommes seront à même d’en percevoir le bien-fondé… »
Il en résulte que la vigilance réside dans la maîtrise de soi. Et tel est également le fondement de la sagesse, qui est la plus éminente des qualités : savoir dominer ses penchants naturels et freiner les habitudes auxquelles on est accoutumés. La vigilance et la sagesse sont donc intimement liées, leur principe commun étant la maîtrise de soi et le contrôle de sa nature.Si Moché, incapable de réfréner son ardeur, avait pénétré dans le Sanctuaire sans y avoir été convié, il aurait perdu toutes ses qualités exceptionnelles. L’essence de l’homme est en effet sa capacité à se contrôler, aptitude qui est elle-même issue de sa sagacité. Or comme le disent nos Sages :
« Celui qui n’a pas de sagesse, que possède-t-il donc ? » Et à cet égard, ils soulignent dans le Midrach en exergue que « tout érudit dépourvu de sagesse est pire qu’une charogne ». Ceci nous permet de comprendre pourquoi nos Sages insistent sur ce point précisément au début du livre de Vayiqra, bien que toutes les paroles transmises à Moché, tout au long de la Tora, soient tout autant précédées d’un appel (comme l’indique Rachi ; voir également Ramban et Sifté ‘Hakhamim). Le livre de Vayiqra est consacré aux sacrifices et à la sainteté du Sanctuaire. A ce sujet, le verset annonce : « Celui qui sacrifie aux dieux sera voué à la mort : seul à l’Eternel exclusivement ! » (Chémot 22,19) – c’est-à-dire que tout ce que nous approchons (qorban) doit être exclusivement dédié à D.ieu. Ce point est donc signalé dès le premier verset de notre paracha – « l’Eternel appela Moché » –, indiquant que toute volonté personnelle doit s’annuler face à Lui. La soumission de notre personne doit être telle, que l’on n’en viendra jamais à pénétrer dans le Sanctuaire sans y avoir été convié.
Cet extrait est issu du livre « Lekah Tov » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation. Tous droits réservés.