La mitsva
On veillera à ne pas accomplir une action pouvant entraîner des soupçons. En effet, en agissant de la sorte, on inciterait autrui à émettre des soupçons illégitimes à notre égard, et l’on se trouverait être en partie responsable de cette faute.
Les personnes concernées par cette mitsva
Cette obligation s’applique en tous lieux et à toutes les époques. Elle concerne aussi bien les hommes que les femmes ; et on enseignera à nos enfants à la respecter. Il faut se garder de tout acte équivoque, même si les soupçons suscités sont très improbables, ou si seule une personne mal intentionnée serait susceptible de porter un mauvais jugement. Par exemple, un homme fait de la monnaie avec l’argent du tronc de charité à la synagogue. Les témoins de cette scène n’ont aucune raison de penser qu’il prend plus qu’il ne rend. Pourtant, la chose est néanmoins interdite car nul n’est totalement à l’abri du soupçon.
L’extrême prudence du ‘Hafets ‘Haïm
Après son mariage, Rabbi Aryé Leïb, le fils du ‘Hafets ‘Haïm, désirait être accepté comme le Dayan d’une ville de son choix. Lorsque le poste fut disponible, il présenta aussitôt sa candidature. Cependant, à la même période, le ‘Hafets ‘Haïm reçut la lettre d’un Rav qui désirait également postuler pour la même fonction. Ce Rav lui demandait son appui pour obtenir cette place, ne sachant pas que le propre fils du ‘Hafets ‘Haïm s’était lui aussi porté candidat. A partir de ce jour, le ‘Hafets ‘Haïm cessa de parler à son fils de cet emploi, bien qu’il fût fort probable que celui-ci eût témoigné de l’intérêt pour ce poste bien avant l’auteur de la lettre. Le ‘Hafets ‘Haïm craignait, en effet, que l’autre Rav pense qu’il avait été informé qu’un poste était vacant grâce à sa lettre, et, en ayant fait part à son fils, celui-ci lui aurait “subtilisé” la place…
Marit Haayin – les apparences trompeuses
De nombreuses actions sont interdites à cause de Marit Haayin (les apparences trompeuses). Si un acte pouvant prêter à soupçon doit malgré tout être effectué, on veillera donc à proclamer son intention avant d’agir. Comme l’enseignent nos Sages : « Quiconque est soupçonné à tort doit proclamer son innocence. »
Proclamer ses fautes
En règle générale, il est interdit de divulguer les fautes que l’on a commises envers D.ieu. Il existe toutefois une exception : si, à cause de cette discrétion, d’autres personnes innocentes sont soupçonnées à notre place, il est permis de dévoiler ses fautes publiquement, afin de disculper et de préserver la dignité d’autrui. Cette exception peut aller beaucoup plus loin : toute personne désireuse d’agir avec compassion et générosité aurait le droit de s’imputer une faute qu’elle n’a pas commise, dans le seul but d’épargner le coupable d’une humiliation.
Epargner autrui d’une humiliation
Pour déclarer l’année embolismique (c'est-à-dire y ajouter un second mois d’Adar), Rabban Gamliel s’adressa aux Sages et leur dit : « Que sept d’entre vous m’attendent tôt demain matin à l’étage » (où le Beth Din avait l’habitude de se réunir). En y arrivant, Rabban Gamliel trouva huit hommes. Il annonça : « Qui est monté ici sans mon autorisation ? Qu’il descende immédiatement ! » Chmouel le Petit répondit : « C’est moi qui suis monté sans autorisation. Mais je ne suis pas là pour m’associer à vous, simplement pour apprendre comment vous tranchez la Halakha. » Rabban Gamliel lui répondit : « Assieds-toi, mon fils ! Toutes les années mériteraient d’être déclarées embolismiques par ton biais ! » En vérité, ce n’était pas Chmouel le Petit qui était entré sans permission, mais un autre homme. Si Chmouel se dénonça de la sorte, c’est pour éviter à ce dernier une humiliation.
Une autre histoire semblable eut lieu du temps de Rabbi Yéhouda HaNassi. Pendant qu’il dispensait son cours, il sentit soudain une forte odeur d’ail. Il dit à ses élèves : « Que celui qui a mangé de l’ail sorte ! » Rabbi ‘Hiya se leva et sortit. Après lui, tous les élèves se levèrent et sortirent. Le lendemain, Rabbi Chimon le fils de Rabbi Yéhouda HaNassi alla trouver Rabbi ‘Hiya et lui demanda : « Est-ce donc toi qui as importuné mon père hier, pour avoir mangé de l’ail ? » Il lui répondit : « Que D.ieu me préserve d’agir ainsi ! » Si Rabbi ‘Hiya s’était accusé ainsi, ce fut également pour éviter une humiliation à l’élève qui avait effectivement mangé de l’ail.
De qui Rabbi ‘Hiya apprit-il à agir ainsi ? De Rabbi Méïr. Et Rabbi Méïr, de qui l’apprit-il ? De Chmouel le Petit. Et Chmouel le Petit, de qui l’apprit-il ? De Chekhania fils de Yé’hiel, comme nous le voyons dans ce verset : « Chekhania fils de Yé’hiel prit la parole et dit à Ezra : “Nous avons commis une infidélité envers notre D.ieu en épousant des femmes étrangères, appartenant aux populations de ce pays. Mais il reste encore de l’espoir pour Israël !” » Et Chekhania fils de Yé’hiel, de qui apprit-il à agir ainsi ? De Yéhochoua, comme il est écrit : « D.ieu dit à Yéhochoua : “Relève-toi ! Pourquoi tombes-tu sur ta face, alors que c’est Israël qui a fauté ?” Yéhochoua répondit : “Maître du monde, révèle-moi donc qui a fauté !” D.ieu lui dit : “Suis-Je donc un dénonciateur ? Consulte plutôt le tirage au sort !” »
Pourquoi cacher ses fautes ?
Cette interdiction de dévoiler ses fautes est due au fait que l’on doit éprouver de la honte à leur égard. Or, en les exposant en public, c’est comme si on minimisait leur gravité et que l’on méprisait la parole divine. Il est dit à ce propos : « Heureux le porteur d’une faute qui cache son péché. »
Une faute commise en public
Par conséquent, il est parfois nécessaire de proclamer ses péchés. Par exemple, si l’on a fauté en public, il est impératif de reconnaître ses fautes publiquement, afin que nul ne s’en inspire et que la profanation du Nom divin résultant de nos actes s’en trouve diminuée.
Proclamer les fautes d’Israël
Il est permis de faire des remontrances à un Juif qui s’écarte de la Torah, que ce soit par mesure de prévention ou pour le ramener sur le droit chemin, bien qu’on soit amené de la sorte à mentionner ses fautes. Mais en aucun cas on ne doit dire de mal des fauteurs d’Israël dans les prières adressées au Tout-puissant, car l’Eternel n’apprécie que ceux qui s’efforcent de juger favorablement le peuple d’Israël.
« Ecarte de ta bouche toute parole tortueuse, éloigne de tes lèvres tout langage pervers »
Cet extrait est issu du livre « Une justice de paix, Une société fondée sur les principes de la Torah » publié par les éditions Jérusalem Publications, avec leur aimable autorisation.